Nous entamons ici une série thématique qui me
tenait à cœur : La cuisine du delta de la rivière des perles, à savoir de
la région de Canton et de Hong Kong. J’y ai souvent voyagé,
professionnellement, dans une vie antérieure, et j’en garde des souvenirs impérissables
de tous types : Un choc culturel, beaucoup de fous rires, de grands
moments de solitude, des découvertes inouïes, des parties de dés dans des bars à
karaoké, des soirées beaucoup trop arrosées de « Great Wall », des négociations surréalistes les lendemains
matins, un typhon, une hépatite A carabinée, une intoxication
alimentaire, des usines d’un autre siècle et des dortoirs surpeuplés jouxtant
des gratte-ciel, des milliers de pantalons bleu marine et de chemises blanches,
les nuits obscures du continent vs les lumières jamais éteintes de Hong Kong, des
voyages en pousse-pousse - en taxi sans plancher - en Lincoln - en star ferry -
en aéroglisseur - en train - en jonque - en mobylette - ou en 777 business les
rares fois où l'on était surclassés ...
Bref, c’était il y a 20 ans et j’en avais à
peine autant. Je n’avais quasiment jamais quitté la France, et ces expéditions
étaient magiques.
Je suis retournée en Chine depuis, et j’ai eu
l’impression de débarquer dans un pays que je ne reconnaissais pas. Ce qui
n’avait en revanche absolument pas changé c’est cette gastronomie incroyable
qui nous a fait faire des voyages culinaires, improbables, surprenants,
déroutants, mais souvent délicieux et à laquelle je voulais modestement rendre
hommage avec ces quelques recettes.
La cuisine cantonaise est pleine de saveurs,
dont certaines auxquelles les palais occidentaux ne sont pas habitués. On dit
là-bas que tout ce qui vole et n’est pas un avion, qui a quatre pattes et n’est
pas une table ou flotte et n’est pas un bateau, ça se mange. Certes, il y a des
incontournables qui semblent universels tels les raviolis, qui parsèment nombreux
les chariots de dim sum, mais
d’autres parfums, ingrédients ou
plats, nécessiteront sans doute un peu plus de temps pour être apprivoisés.
Le premier incontournable pour moi c’est le
porc char siu. Si je ne devais garder
en mémoire que de deux sensations, ce serait la moiteur qui vous tombe dessus à
la sortie de l’avion au mois d’Août, et l’odeur prégnante du char siu émanant des rôtisseries de Hong
Kong où les morceaux de viande et les volailles rouges sont suspendus en
vitrine.
Le char
siu c’est la marinade cantonaise du porc par excellence, composée de miel,
maltose, de pâte de haricots rouge fermentés, de sauce soja, hoisin et de vin
de riz qui lui donne une belle couleur rougeâtre et une saveur très
particulière. Le porc char siu se mange
avec du riz, des soupes de nouilles ou dans des petits pains (qui était la
recette complète que je voulais vous présenter mais, fidèle à ma légende, j’ai
raté la pâte à pain, donc exit les bao zi)
Vous pouvez cuisiner ainsi la poitrine de porc
(très consommée là-bas mais c’est quand même un gras), ou d’autres morceaux
plus maigres, j’ai choisi un intermédiaire : de l’échine, grasse juste ce
qu’il faut et surtout très tendre.
Je vous propose 2 recettes pour la marinade, l’une
complète et donc plus complexe en terme d’ingrédients (il vous faudra trouver
du maltose et des cubes de soja fermentés que vous aurez peut-être du mal à
ré-utiliser par la suite) une autre en utilisant partiellement de la sauce char
siu toute prête, les autres ingrédients étant plus communs.