Jadis (= la semaine
dernière), je pensais que l’aneth était une plante qui poussait exclusivement
en bordure de la mer du Nord, sur les rives des piscicultures de saumon.
Marrez-vous.
J’ai donc appris que, quoique
très utilisée en Scandinavie, en Allemagne, et en Europe centrale, cette plante
est originaire du bassin méditerranéen. Et saviez-vous qu’on la mangeait en
Inde (savaa), au Laos où elle est
appelée Coriandre laotienne, (d’ailleurs maintenant que j’y pense, la coriandre
de mon balcon que je n’arrive jamais à maintenir à l’état de coriandre finit
toujours par faire des feuilles hautes filigranées qui ressemblent plus à de
l’aneth qu’à autre chose…), en Chine et… au nord du Vietnam ?
C’est donc à Hanoi que l’on voyage
aujourd’hui, avec cette recette de poisson sauté au curcuma et à l’aneth :
Cha Ca Than Long.
Traditionnellement, c’est du
poisson-chat. J’ai bien trouvé dans mon épicerie asiatique un silure congelé
non vidé d’1,20 mètre mais j’ai renoncé pour me rabattre sur de la lotte,
poisson blanc, ferme, avec peu d’arêtes et déjà prêt à cuire.
Traditionnellement, le plat
se sert aussi directement dans une sauteuse placée sur un réchaud à gaz au
centre de la table où l’huile crépite et maintient le plat bouillant pendant
tout le repas. A défaut de Butagaz portatif, si vous avez ces plaques en fonte
que l’on utilise fréquemment dans les restaurants asiatiques vous pouvez également
les chauffer et servir votre plat dessus (qui ainsi crépitera bruyamment en recouvrant
toute tentative de conversation, et projettera sur les chemises et corsages de
vos hôtes des gouttelettes d’huile chaude bien caractéristiques, colorées d’un
beau jaune vif curcuma). C’est vous qui voyez. Moi je me suis contentée
d’apporter la cocotte avec couvercle sur la table, c’est moins folklorique,
mais je n’ai pas eu à payer de pressing.
Les amateurs d’aneth seront
comblés. Evidemment, si vous n’aimez pas particulièrement cette herbe aromatique
… renoncez. Bien qu’agrémenté d’une multitude d’accompagnements, puisqu’il se
sert avec du vermicelle de riz, des herbes et des cacahuètes, l’aneth reste
de loin l’ingrédient dominant et donne toute sa saveur si caractéristique
à ce plat.
Enfin presque.
Parce qu’il y a aussi la
sauce.
Elle, elle va donner toute son odeur caractéristique à votre
appartement pendant au moins 3 jours. A
base de mam ruoc cette pâte rose
violacé de crevettes fermentées, elle est forte, âcre, surprenante. En
d’autres termes : elle fouette grave. Mais soyez téméraires et curieux, l’aventure
ça se mérite. Si toutefois vous n’arrivez pas à passer outre les effluves
ichtyennes, et les regards suspicieux de votre voisin de palier qui pensera que
vous gardez depuis 3 semaines un mérou suspendu au-dessus de votre porte d’entrée,
j’ai aussi une solution : Remplacez-la par de la sauce pour nem (nuoc cham), douce, consensuelle, que
vous pourrez acheter toute faite, qui sent bon, et qui se marie également très
bien avec ce plat.
Eh bien voilà, vous savez à
peu près tout. Si vous n’avez pas l’opportunité d’aller déguster un Cha Ca dans
l’un des restaurants uniquement dédiés à ce plat à Hanoi (Le
Cha Ca Thang Long par exemple) voici
de quoi voyager sans quitter votre cuisine.